Il faut dire que dans de nombreuses sociétés du monde – y compris occidentales – l’agriculture, les métiers de la terre, restent majoritairement associés aux hommes. Lobsang, lui, formule autre chose : “la main de la femme est plus précise que celle de l’homme”. Cette expression, nous la retrouverons plus tard dans d’autres langues, d’autres contextes. Elle dit quelque chose qui nous intéresse particulièrement : la complémentarité des savoirs paysans portés par les femmes et par les hommes, et la manière dont certains savoirs, féminins, restent longtemps en retrait, alors qu’ils sont au cœur du soin et du quotidien.

À partir de là, nous décidons de mener des ateliers spécifiquement auprès des femmes, de tous horizons : agricultrices, jardinières, françaises, marocaines, soudanaises, tibétaines, exilées ou non. Peu importe le pays, la langue, le parcours : toutes portent avec elles des connaissances précieuses, depuis la graine jusqu’à sa transformation. Des savoirs qui ont traversé les époques avec une fonction à la fois utilitaire et rituelle : se nourrir, bien sûr, mais aussi se soigner, soulager la douleur, accompagner les corps dans les moments de vulnérabilité.

Pour partager ce trésor de l’humanité, nous commençons à rassembler ces connaissances sous forme de recueils, mêlant entretiens, récits et recherches. Ce livre sur les douleurs menstruelles et les plantes est l’un de ces fils : il naît de ces paroles de femmes qui racontent comment elles apaisent, comment elles tiennent, comment elles transmettent. Et pendant que ces pages circulent, nous poursuivons ces temps de rencontres et d’échanges, pour que ces savoirs ne restent ni figés, ni oubliés, mais vivants.